Nouvelle loi sur le droit d’auteur assouplit les conditions pour les clauses de cession dans les contrats de travail
Une nouvelle loi assouplit les conditions pour une clause dans le contrat de travail par laquelle votre collaborateur vous cède des droits d’auteur. La validité d’une telle cession concernant des formes d’exploitation encore inconnues n’exige désormais plus que la clause octroie au collaborateur une participation au profit. Le droit de votre collaborateur à une rémunération appropriée et juste est désormais assuré par la loi même, via le mécanisme de la « clause de succès ».
Auteur plus vite que vous ne le pensez : droit d’auteur de votre collaborateur et cession à l’employeur
Votre collaborateur crée des œuvres, par exemple une brochure ou un rapport technique, dans le cadre de son contrat de travail ?
Alors, il est probable que votre collaborateur bénéficie de la protection du droit d’auteur pour ces créations.
Votre collaborateur peut vous céder la partie patrimoniale de son droit d’auteur (les droits patrimoniaux).
Cela implique que votre collaborateur vous cède le droit exclusif d’exploiter l’œuvre. Si vous disposez de ce droit en tant qu’employeur, vous pouvez utiliser les créations de votre collaborateur sans devoir demander son consentement en ce sens. Vous pouvez ainsi publier la brochure sur le site web de l’entreprise ou remettre le rapport technique au client.
Une telle cession par votre collaborateur de ses droits patrimoniaux doit être faite expressément, par le biais d’une clause dans le contrat de travail ou d’une annexe au contrat de travail.
La cession par votre collaborateur peut-elle également porter sur une forme d’exploitation encore inconnue ?
Une telle cession par votre collaborateur peut-elle également porter sur des formes d’exploitation qui étaient encore inconnues au moment de la signature de la clause de cession ?
Exemple :
« X » années avant l’avènement d’Internet, votre collaborateur a signé avec vous un contrat de travail dans lequel il vous a cédé ses droits patrimoniaux sur ses créations dans le cadre de son contrat de travail. Sur la base de cette clause, pouvez-vous autant d’années plus tard également diffuser les œuvres de votre collaborateur sur Internet ? Ou est-il impossible que la cession par votre collaborateur portait sur l’exploitation via Internet, celui-ci n’étant pas encore connu à l’époque ?
La loi apporte une réponse à cette question. Un assouplissement en la matière a récemment été apporté.
Situation avant le 1er août 2022
Selon le cadre légal qui s’appliquait jusqu’au 1er août 2022, une clause de cession relative à des créations dans le cadre d’un contrat de travail ne pouvait porter valablement sur des formes d’exploitation inconnues que lorsque :
- la clause le stipulait expressément, et que
- dans cette clause, l’employeur octroyait à son collaborateur une participation au profit généré par cette exploitation pour l’employeur.
Cette deuxième condition a fait apparaître des défis et suscité des discussions dans la pratique et est souvent restée lettre morte. La question s’est ainsi posée de savoir comment un employeur qui ne génère pas de « profit » devait gérer la chose et si la participation du collaborateur au profit pouvait également être fixée à « 0 ».
Situation depuis le 1er août 2022
La « clause de succès » dans la loi...
Le 1er août 2022 est entrée en vigueur une loi transposant une directive européenne sur le droit d’auteur par toute une série de dispositions.
L’une des réalisations de cette nouvelle loi est qu’elle introduit dans notre législation plusieurs mesures visant à assurer qu’un auteur dont les œuvres sont exploitées par quelqu’un d’autre (comme son employeur) reçoit une rémunération appropriée et juste à cet effet. Des conventions collectives peuvent être conclues au niveau sectoriel, fixant des modalités sur cette rémunération.
Si la rémunération initialement convenue (par exemple, le salaire) s’avère exagérément faible par rapport aux revenus tirés de l’exploitation, l’auteur est désormais en droit, en vertu de la loi elle-même, de réclamer une rémunération supplémentaire, appropriée et juste, c’est-à-dire même si le contrat ne stipule pas ce droit. Il s’agit de la « clause de succès » inscrite dans la loi.
De cette manière, l’auteur a la garantie légale de pouvoir bénéficier du succès futur de l’exploitation de son œuvre.
Le mécanisme légal de la clause de succès s’applique également aux auteurs qui ont créé des œuvres dans le cadre de leur contrat de travail et qui ont cédé les droits d’exploitation à leur employeur. L’auteur peut également invoquer ce droit légal à une rémunération appropriée et juste en ce qui concerne des formes d’exploitation qui étaient inconnues au moment de la conclusion du contrat de travail.
... permet l’assouplissement des conditions pour la clause de cession dans le contrat de travail
Etant donné le mécanisme légal de la clause de succès, le législateur a jugé que les conditions de validité susmentionnées pour les clauses de cession dans des contrats de travail relatives à des formes d’exploitation inconnues avaient perdu leur utilité. C’est pourquoi la nouvelle loi a supprimé ces conditions, en ce qui concerne les œuvres protégées par le droit d’auteur au 7 juin 2021 ou après cette date.
Conclusion
Dorénavant, vous pouvez convenir avec votre collaborateur d’une clause de cession concernant des formes d’exploitation encore inconnues, sans qu’il soit nécessaire pour la validité d’une telle cession que vous octroyiez une part bénéficiaire à votre collaborateur dans la clause.
La loi elle-même garantit désormais à votre collaborateur le droit à une rémunération appropriée et juste pour l’exploitation de ses œuvres. Ce droit pourra encore être concrétisé au niveau sectoriel, et peut donner lieu à une demande de la part de votre collaborateur-auteur d’une rémunération supplémentaire.
Source :
Loi du 19 juin 2022 transposant la directive (UE) 2019/790 du Parlement européen et du Conseil du 17 avril 2019 sur le droit d’auteur et les droits voisins dans le marché unique numérique et modifiant les directives 96/9/CE et 2001/29/CE, Moniteur belge 1er août 2022