Liberation Day : quelles sont les conséquences des droits de douane américains sur les employeurs belges ?
Les livres d'histoire retiendront le 2 avril 2025 en tant que Liberation Day. Ce jour-là, le président américain Donald Trump a annoncé des droits de douane sur les importations en provenance de l'Union européenne et à destination des États-Unis. Entretemps, les droits de douane sont entrés en application et, bien que leurs conséquences concrètes ne soient pas encore claires, elles toucheront les employeurs belges quoi qu’il en soit, en particulier dans les secteurs les plus orientés vers l'exportation.
Concrètement, à quoi les employeurs doivent-ils donc s'attendre ? Les droits de douane peuvent vous obliger à ajuster votre stratégie commerciale, ce qui pourrait affecter vos employés en réduisant le travail, en délocalisant la production aux États-Unis ou en réduisant vos coûts de main-d'œuvre.
Chômage temporaire
L'annonce récente des droits de douane américains provoque des vagues dans l'économie mondiale. Les entreprises belges qui dépendent du commerce international, des exportations ou des importations de matières premières pourraient être particulièrement touchées. Votre entreprise est-elle confrontée à une baisse d'activité, voire à un arrêt temporaire de la production ? Le système de chômage temporaire offre une solution. Le chômage temporaire peut être demandé pour des raisons économiques lorsqu'il y a un manque de travail dû à des circonstances économiques. La mesure permet d'adapter temporairement le rythme de travail existant. Vos travailleurs restent donc en service, mais l’exercice de leur contrat de travail est totalement ou partiellement suspendu de manière temporaire.
Adapter le temps de travail
Y a-t-il temporairement moins de travail ? Dans ce cas, vous pouvez demander à vos travailleurs de prendre les heures supplémentaires ou les jours de RTT accumulés.
- Votre travailleur a-t-il déjà presté des heures supplémentaires (par exemple, dans le cadre d'une multiplication extraordinaire du travail) et a donc droit à un repos compensatoire ? Vous pouvez alors lui demander de le prendre. D’un point de vue juridique, il n’est pas obligatoire d’avoir un accord entre travailleur et employeur quant au moment de prise du repos compensatoire. Vous pourriez donc imposer ceci, bien qu'il soit recommandé que la prise du repos compensatoire fasse l'objet d'un accord mutuel. N’oubliez pas de consulter votre règlement de travail. Il se peut qu’il contienne des règles quant au moment où le repos compensatoire peut être pris.
- Il en va de même pour la prise des jours de RTT. Ces jours sont octroyés pour atteindre la durée de travail hebdomadaire moyenne sur base annuelle (par exemple 40 heures de travail par semaine avec 12 jours de RTT donnent une moyenne de 38 heures sur base annuelle). Lorsqu’il n’existe pas de convention collective de travail et que ces jours de RTT peuvent être pris individuellement, il est conseillé d’en inclure les modalités dans le règlement de travail.
En tant qu'employeur, attendez-vous structurellement moins de travail ? Si c'est le cas, vous pouvez envisager de réduire les heures de travail pour une durée indéterminée. Vous pouvez le fixer le cadre dans une CCT d’entreprise ou dans le règlement de travail. Pour ce faire, il convient de suivre la procédure adéquate et de prévoir une consultation sociale si nécessaire. Les travailleurs, qui travailleront moins d'heures, pourront également réclamer moins de salaire.
En outre, en tant qu'employeur, vous pouvez demander une réduction des cotisations ONSS si la réduction du temps de travail est inférieure à 38 heures par semaine d'au moins une heure complète et si cette réduction du temps de travail est introduite pour une durée indéterminée. Si vous en faites usage, vous devrez payer des heures supplémentaires plus tôt qu'auparavant, c'est-à-dire lorsque des heures supplémentaires sont effectuées au-delà de la nouvelle limite réduite.
À titre d’exemple :
En moyenne, une entreprise fait travailler ses travailleurs 38 heures par semaine. Comme il y a moins de travail, ils passent à 37 heures par semaine. Ceci est réglementé par le règlement de travail, et une demande de réduction des cotisations ONSS (400 € pendant 8 trimestres) est introduite. Si un travailleur effectue exceptionnellement des heures supplémentaires au-delà de ces 37 heures, un supplément sera dû.
Avez-vous plus de travail, par exemple parce qu'il y a plus de demande pour les produits belges ? Vous pouvez alors permettre à vos employés d'effectuer des heures supplémentaires n recourant aux heures supplémentaires volontaires. Il s’agit d’heures supplémentaires prestées en dehors des horaires de travail annoncés, et que vous ne devez donc pas programmer à l’avance. Pour cela, la convention (valable à chaque fois pour 6 mois) et la disponibilité de votre employé suffisent. Les heures supplémentaires volontaires ne sont pas compensées par un repos compensatoire, mais sont payées à la fin de la période de paie. Dans l'ensemble, il y a un maximum de 120 heures par année civile et par travailleur a été fixé, bien que certains secteurs aient augmenté ce nombre. Gardez à l’esprit que vous payez normalement un supplément lorsque le seuil de sursalaire est franchi. Le nombre d'heures supplémentaires volontaires a été étendu jusqu'au 30 juin 2025 à un maximum de 220 heures, dont 120 heures supplémentaires de relance. Ces heures supplémentaires de relance ne sont pas seulement exemptes de repos compensatoire : elles ne donnent lieu à aucune cotisation sociale, ni à aucun précompte professionnel, ni à aucun supplément. L’accord de coalition prévoit d'étendre cette mesure et d'augmenter le nombre d'heures possibles.
Restructurations, fusions et reprise ?
Que se passe-t-il si vous êtes contraint de cesser votre collaboration avec des travailleurs ? Si plusieurs licenciements sont prononcés sur une courte période pour des raisons économiques, la question du licenciement collectif doit également être examinée. Dans ce cas, des obligations supplémentaires doivent être respectées :
- l’entreprise doit lancer une vaste procédure d'information et de consultation ;
- une indemnité supplémentaire est due ;
- l’entreprise doit mettre en place une cellule pour l'emploi afin d'apporter un soutien maximal aux travailleurs licenciés dans leur recherche d'un nouvel emploi.
Si l'entreprise (ou un département) est fermée, la loi sur les fermetures d’entreprise, qui prévoit des obligations d'information supplémentaires, peut également s'appliquer. Il peut également y avoir une indemnité de fermeture obligatoire à payer. Important : la législation sur les licenciements collectifs et la loi sur les fermetures d’entreprise ne s'appliquent qu'aux grandes entreprises (20 employés ou plus). Il peut y avoir des obligations supplémentaires dans votre secteur lorsque plusieurs travailleurs sont licenciés en même temps. Le seuil d'application peut également varier en fonction du secteur.
Heureusement, les choses ne se passent pas toujours de cette manière. Il arrive que les entreprises trouvent un acquéreur qui souhaite poursuivre leurs activités. Ou que vous choisissez d'unir vos forces en fusionnant. Dans ces cas, les employés concernés sont protégés par la CCT 32bis : le contrat de travail reste inchangé avec le nouvel employeur après le rachat ou la fusion.
Frais salariaux
Un autre moyen d'éviter les licenciements consiste à réduire stratégiquement les frais salariaux. Il est par exemple avantageux de partager vos travailleurs avec d’autres employeurs.
Les heures de travail hebdomadaires peuvent être réparties entre plusieurs entreprises, ou vous pouvez laisser votre travailleur travailler temporairement pour un autre employeur sans mettre fin au contrat de travail. Cela vous permettra non seulement de réduire vos frais salariaux, mais aussi d'investir dans vos travailleurs en leur permettant d'acquérir de nouvelles compétences. En outre, lorsque votre entreprise aura retrouvé son dynamisme, vous n'aurez pas à investir dans la recherche de nouveaux travailleurs.
Vous avez des problèmes de liquidité qui vous empêchent de payer les salaires de vos travailleurs ? Le paiement des salaires est une obligation que vous devez remplir. Toute personne qui ne le fait pas commet une infraction pénale. Les salaires doivent être versés au moment prévu par une CCT ou par un règlement de travail. Il n’existe aucune CCT ou le règlement de travail ne stipule rien ? Le paiement doit alors être effectué au plus tard le quatrième jour ouvrable suivant la période de travail concernée. Après cette date, le salaire peut être réclamé et des intérêts légaux sont dus sur le salaire, à condition que le salaire ait été réclamé et que l'employeur refuse de le payer.
Les cotisations de sécurité sociale doivent également être payées à temps. Les employeurs qui ne le font pas s'exposent à des risques :
- une majoration de la cotisation de 10 % du montant non payé à temps ;
- un taux d'intérêt de retard de 7 % par an pour la période allant de l'expiration du délai légal au jour du paiement.
L’ONSS peut renoncer à ces sanctions, accorder une exonération ou une réduction sous certaines conditions.
Les employeurs peuvent demander à l’ONSS un plan d’échelonnement à l’amiable « général » pour les cotisations de sécurité sociale dues.
- Le plan d’échelonnement se réfère au total des dettes échues à la date de la demande.
- L’ONSS tient compte des éventuels suppléments de cotisation dus et des intérêts courus pour déterminer le montant à rembourser chaque mois (mensualités).
- Les échéances et le montant des mensualités sont fixes.
Pendant la période covid et la crise énergétique, l’ONSS a prévu un plan d’échelonnement « spécial » pour certaines cotisations et sans appliquer de pénalité (par exemple, la cotisation pour les vacances annuelles, les cotisations sociales pour des trimestres spécifiques…). Reste à savoir si un tel plan d’échelonnement sera également mis en place pour le « Liberation Day ».
Optimisation des frais salariaux
En outre, en optimisant votre politique salariale, vous pouvez réduire les coûts salariaux. On ne rémunère pas moins, mais plus intelligemment. Veuillez envisager des alternatives à la rémunération brute telles que des chèques-repas, une assurance de groupe, un bonus salarial CCT 90, une indemnité de frais ou d’autres avantages sur lesquels aucune (ou moins de) cotisation ONSS ou impôts sont dus. Une autre option consiste à rendre une partie de la rémunération plus flexible, par exemple par le biais d’un plan de cafétéria.
Attention : certains avantages salariaux alternatifs ne peuvent pas modifier ou remplacer les avantages salariaux existants. En outre, les changements doivent toujours être effectués en concertation avec votre travailleur.
L’inflation
En Belgique, l’indexation des salaires est réglée au niveau des commissions paritaires. Des accords sur l’indexation des salaires minimums et/ou effectifs et sur l’utilisation de moments fixes ou de l’indice pivot seront établis en fonction du secteur. En l’absence d’accords sectoriels, l’employeur doit tenir compte du montant du revenu minimum mensuel moyen garanti (RMMMG). Des dispositions de plus en plus favorables peuvent être prises au niveau de l’entreprise.
Les droits de douane peuvent entraîner une hausse des prix et une modification des comportements d’achat. Par conséquent, les attentes concernant les ajustements salariaux par le biais de l’indexation pourraient également devoir être revues. En tant qu’employeur, vous êtes tenu de procéder à ces ajustements.
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Écrit par
Manager Centre de connaissances, Acerta Consult